Une étude de l’université de Hongkong a testé l’efficacité des masques sur des hamsters pour lutter contre la propagation du nouveau coronavirus.
Contre ceux qui, comme les Danois ou Sibeth Ndiaye, les jugent « inutiles », les partisans des masques auront désormais un argument massue : l’étude des « hamsters masqués » de l’université de Hongkong. Présentés dimanche, les résultats de cette expérience menée sur 45 hamsters montrent que « l’efficacité du port du masque contre la pandémie de coronavirus est énorme », s’est enthousiasmé le professeur Yuen Kwok-yung, du département des maladies infectieuses de la faculté de médecine, avec 60 à 75 % de transmission en moins grâce à de simples masques chirurgicaux.
Yuen Kwok-yung n’est pas n’importe qui : vétéran du Sras, il a été l’un des premiers à tirer la sonnette d’alarme sur le Covid-19, en se rendant dès le 17 janvier à Wuhan, où, avec un groupe de scientifiques chinois du continent, il a constaté la transmission entre êtres humains. C’est leur rapport à Pékin qui a finalement forcé les autorités à admettre la gravité de la situation. Depuis, il fait partie des plus ardents partisans des masques, jugeant qu’ils sont un des éléments décisifs, si ce n’est « le plus important », dans la réponse contre l’épidémie.
66 % de hamsters infectés sans masque, entre 35 et 15 % avec
Voulant démontrer son fait, il a employé les grands moyens et recruté les plus mignons des cobayes : des hamsters. Pas question cependant de fabriquer des masques sur mesure. Les petits rongeurs seraient bien incapables de les porter… Les chercheurs de son laboratoire ont donc placé un groupe d’animaux infectés et un autre en bonne santé dans deux cages séparées. Des masques chirurgicaux (FFP1 donc) ont été tendus sur certaines cages, une soufflerie projetant l’air de la cage des malades vers celle des hamsters sains. Sans masque, les deux tiers des hamsters sains étaient infectés en une semaine. Avec un masque sur la cage des hamsters sains, un tiers seulement était infecté. Avec un masque sur la cage des animaux infectés, le taux d’infection tombe à 15 % parmi les hamsters ! Et rassurez-vous, tous les hamsters sont désormais guéris.
« Nous savons désormais qu’une grande partie des personnes infectées ne présentent pas de symptômes, donc, le port universel du masque est vraiment important », a résumé la sommité de la faculté de médecine de l’université de Hongkong. Évidemment, plusieurs points invitent à la prudence et à davantage de recherches : « Cette nouvelle étude n’a pas encore été publiée pour le moment, et on devrait toujours être prudent de ne pas se fier trop à des prépublications », rappelle Benjamin Cowling, professeur à l’école de santé publique de l’université de Hongkong, auteur d’une étude approfondie sur l’efficacité du masque sur les coronavirus saisonniers (comme celui du rhume), parue en avril. « Elle utilise de petits animaux plutôt que des humains, et il n’est pas certain que l’infection se répandrait de la même manière chez l’homme. Mais cela reste une étude importante. »
Pas une armure, mais un bouclier indispensable
Pourquoi ? « C’est la première étude qui observe spécifiquement les effets des masques sur le Covid-19 », détaille-t-il. « Elle montre que les masques chirurgicaux peuvent être utilisés pour bloquer la transmission active, si portés par les personnes infectées, mais peuvent aussi être utilisés pour protéger les porteurs qui ne seraient pas infectés. » Le tout est de bien comprendre que l’usage du masque par le « grand public » n’a pas pour but d’arriver à une protection totale, imperméable contre toute contamination, comme dans des conditions de laboratoire, ou comme il est nécessaire pour des professions à risque, tels les soignants, qui devront, eux, se tourner vers les masques FFP2, protecteurs à près de 100 %.
Le but de l’usage de masques chirurgicaux par le grand public est une protection collective, une mesure de lutte contre l’épidémie, imparfaite, mais qui freine significativement la propagation du virus à grande échelle. « Je ne pense pas qu’il faille croire que les masques prodiguent une protection totale, mais seulement une certaine forme de protection. Il est mieux d’en porter que de ne pas en porter », ajoute Benjamin Cowling. En somme, un masque n’est pas une armure intégrale, mais c’est un bouclier léger, indispensable dans la guerre de longue haleine contre le virus.
Enfin, le professeur de l’université de Hongkong met en garde contre ceux qui voudraient faire des masques l’alpha et l’oméga de la lutte contre la pandémie : « La plus grande partie du monde a fait face à une pénurie de masques », rappelle-t-il. « Il y a de nombreux facteurs responsables des réponses réussies par les autorités en Asie. La plus importante est de tester, d’isoler les malades, de retracer et de mettre en quarantaine (la stratégie “Tester et tracer”), et la plupart des régions d’Asie ont aussi employé la distanciation sociale pour réduire la transmission. Les masques chirurgicaux aident sans aucun doute, mais je ne crois pas qu’ils sont la principale raison du succès. »
Source : Le Point.fr