Pour l’explorateur et psychiatre Bertrand Piccard, “le confinement est un luxe” qui permet de mieux vivre “l’instant présent”, sans penser au futur.
Si les prises de parole se multiplient pour aborder “l’après”, sous-entendu l’après-confinement lié au coronavirus, Bertrand Piccard, lui, préfère parler du présent, et seulement du présent. Le psychiatre et explorateur, homme-clé du projet Solar Impulse, a livré mardi matin quelques conseils pour bien vivre sans attendre un confinement aux allures de pure contrainte.
Piccard affirme que “Le confinement est un luxe”. “Beaucoup de gens le vivent comme un enfermement, mais c’est un luxe de pouvoir être confiné dans une situation comme aujourd’hui. Il y en a qui sont au front, en train de se dévouer pour les autres.”
“Bouger à l’intérieur de soi-même”
Les mesures drastiques imposées pour lutter contre l’épidémie ne sont pas seulement un “luxe”, selon Bertrand Piccard : elles seraient même une véritable opportunité. “Dans la vie de tous les jours, on bouge trop et on bouge à l’extérieur de soi-même”, regrette l’explorateur, auteur du premier tour du monde en ballon il y a plus de vingt ans. “C’est intéressant de bouger à l’intérieur de soi-même, voir ce qu’il se passe, s’écouter. On peut vivre un confinement comme une expérience spirituelle, qui n’a rien à voir avec la religion.”
Mieux que ça : “C’est une retraite collective, où on vit l’instant présent”, sans penser au futur ni au passé. “Si, dans une nacelle ou dans le confinement, on se projette dans le futur, on se réjouit que ça soit fini, on compte les jours, c’est très dur à vivre, c’est un supplice. Se mettre dans l’instant présent, se sentir exister dans son corps, se sentir respirer, qu’on avance avec le temps, au moment où le confinement sera fini, on sera presque étonnés que ça soit déjà fini.
Un deuil plus difficile
Certains avanceront que cette introspection est seulement possible lorsqu’on est seul. Faux, répond Bertrand Piccard, qui repense tout d’un coup à son tour du monde en ballon, en 1999. À l’époque, le Suisse faisait équipe avec l’Anglais Brian Jonnes : “Nous avons dû apprendre à communiquer entre nous, à tout nous dire. Le but n’est jamais de critiquer l’autre, ni de parler de l’autre, mais de parler de ce qu’on ressent soi-même. Quand on ressent quelque chose de pénible, on peut le dire, ça ne veut pas dire que l’autre se trompe. Quand on échange deux perceptions, c’est une vraie manière de se rapprocher.”
À l’écouter disserter sur les conséquences d’un confinement imposé, qui dure maintenant trois semaines, on peut se dire que cela n’a que des bienfaits. Il est pourtant un aspect où le fait d’être séparé des autres nous heurte : la mort de proches. “Ça va être beaucoup plus difficile de faire le deuil”, prévient le psychiatre suisse, pour qui il est là encore question de travail sur soi-même : “Nous sommes dans une situation irréversible, on ne peut en sortir. Par conséquent, il y a une philosophie nécessaire de l’acceptation. Accepter que quelque chose soit comme il est, c’est une décision pleine de sagesse. Il faut aussi voir la vie comme une expérience permanente, où on apprend à faire toujours mieux, à être toujours plus sage, pas simplement se dire que la vie c’est pour être riche et heureux. Ça ne va pas toujours comme on veut et c’est cela qu’on doit accepter.”
Source : Europe 1